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BD Puchol-ManginLes secrets de Jeanne - Actualité

Benoît XIII, la papauté cachée et Jeanne.

Martial Cadiou, novembre 2021

« Par les damnés, j’entends [...]les exclus. Mais par les exclus, j’entends aussi tous ceux qui, un jour, excluront à leur tour. Car l’état communément et absurdement nommé existence est un rythme d’enfers et de paradis. Car les damnés ne le resteront pas , car le salut précède la perdition, car nos maudits déguenillés seront un jour les anges mielleux qui, bien plus tard encore, repartiront à l’endroit même d’où ils étaient venus. »

Charles Fort

Dans un chapitre consacré au Grand Schisme d’Occident, Jean Robin, Le royaume du Graal : Introduction au mystère de la France Éd. G.Trédaniel, pp.499-520, nous laisse entendre que le pape Benoît XIII aurait été le premier titulaire de la Papauté cachée inaugurant ainsi l’« Église d’Avignon », pierre d’achoppement pour l’Église de Rome.
Pedro De Luna naquit en 1328 (1) à Illueca, petite ville aragonaise de la province de Saragosse. Issu d’une famille de la haute noblesse, apparentée aux rois d’Aragon (2). Par sa mère, il descendait du roi maure de Majorque, Saïd-ben-Alhaken, baptisé par le roi Jaime le Conquistador. Le royaume d’Aragon exerçait alors sa puissance et son influence sur le Roussillon, la « Grande Catalogne », les Baléares, la Sicile, la Sardaigne et la Corse.
Benoît XIII était cardinal de Santa-Maria in Cosmedin. Sa famille avait pris des armes parlantes : un croissant de lune dans son blason. La célèbre prophétie des papes attribuée à saint Malachie (3), publiée à Venise (un des sièges de la « contre-initiation » jusqu’en 1896 selon Jean Robin), due au bénédictin Arnold de Wion en 1595 lui attribuait la devise : « Luna Cosmedina », annonciatrice de schisme au sein de l’Église ! Cependant, Arnold de Wion, ne considère nullement Benoît XIII comme un antipape. Pas plus que Félix V alias Amédée VIII ! (cf : Jacques Halbronn, Papes & prophéties : décodages & influence Éd. Axiome, 2005)
Dans un ouvrage déterminant, Gérard Touzeau, Benoît XIII, le trésor du pape catalan Éd. Mare Nostrum 2009, réhabilite cette grande figure papale injustement bannie de la généalogie papale car inventorié antipape dans l'Annuaire Pontifical (4). L’auteur nous livre ici des informations capitales pour la compréhension du mystère de Jeanne d’Arc.
Ainsi, p.9 : « Seuls le Comte d’Armagnac et quelques évêques de Catalogne sont restés, jusqu’au bout, fidèles à Benoît XIII. Reclus dans sa forteresse de Peniscola (…) Le château de Peniscola, entre Barcelone et Valence, fut élevé par les Templiers et appartint ensuite à l’ordre de Montesa (5). »
L’obédience du pape Benoît XIII se matérialisait dans le Midi aux terres du Comte d’Armagnac, principalement le diocèse de Rodez et l’archidiaconé de Rivière dans le diocèse de Tarbes.
Son légat en pays de Rouergue fut Jean Carrier, cardinal de SaintÉtienne-au-Mont-Caelius, lieutenant-général de Jean IV d'Armagnac. Condamné par contumace en 1420 par les commissaires de Martin V, il se réfugia dans les gorges du Viaur au château de Tourène, surnommé "Péniscolette" en raison de l'analogie de topographie avec celle de Peniscola. Le nonce de Martin V tentera en vain pendant près de trois ans de le déloger. Le siège de Tourène se terminera en décembre 1423 par la fuite de Jean Carrier à Peñiscola. Benoît XIII ne choisira pas la forteresse de Peniscola par hasard. L’ordre de Montesa, fut créé sur les décombres de l’ordre du Temple car le roi d’Aragon, Jacques II le Juste, s’opposera aux décisions pontificales de transfert de biens de l’ordre du Temple à l’ordre de Malte. Jacques I er d'Aragon octroiera même à Jacques de Molay la place forte de Peniscola, près de Valence.
Le roi Jacques II le Juste arrivera à persuader le pape Jean XXII de regrouper ses biens en Aragon et à Valence et de créer un nouvel ordre militaire qui ne différerait pas beaucoup de celui des Templiers, et qui serait chargé de protéger la frontière contre les Maures et les pirates. La nouvelle commande fut dédiée à la Vierge Marie et établie à Montesa. Le pape Jean XXII l’endossera le 10 juin 1317 et lui octroiera le statut de monastique.
Lors de sa retraite forcée, il sera entouré néanmoins de quelques fidèles dont le frère de Vincent Ferrier, Boniface Ferrier, prieur général des chartreux. Benoît XIII aimera à comparer le rocher de Peniscola, où il vit abandonné et renié de tous, à l'arche de Noé qui portait le salut de l'humanité. Pedro de Luna y établira sa résidence, procédant à de nombreux aménagements pour transformer le château en palais pontifical. Cependant, le château décline une architecture au caractère roman pur et de style cistercien, austère et martial. Par son état de conservation et sa typologie constructive, il s'agit du plus important vestige architectonique de l'Ordre du Temple dans tout l'occident.
Jacques Rolland, Le lourd secret des Templiers, p. 73 Éd.Trajectoire, 2015 émet l'hypothèse que l'ordre du Temple ait été fondé prioritairement pour la péninsule ibérique, déjà reconquise, même si créé dans le royaume de France. Dès le début du XIIe siècle, les rois d'Aragon s'intéressèrent à l'ordre du Temple, ou plutôt l'ordre du Temple s'intéressa à eux. Dans les faits, la couronne d’Aragon dépendait politiquement des Templiers.
Ce spécialiste de l'Ordre du Temple nous laisse entendre que les Templiers auraient pu décider de faire du royaume d'Aragon, avec ses deux ports d'importance : Barcelone et Valence, la maison cheftaine, c'est à dire la résidence principale de l'Ordre comme Jérusalem. Paris étant une place forte financière, et en aucun cas la maison cheftaine.
Les préoccupations ésotériques, oraculaires et astrologiques furent très vives et prononcées à la Cour d’Aragon.(cf : Martin Aurell, Messianisme royal de la Couronne d’Aragon Ed.Annales, Histoire, Sciences Sociales, Armand Collin, 1997) J. Garcia Font, Histoire de l’alchimie en Espagne Éd. DervyLivres, 1980 rapporte qu’Eximenis ou Fransec Ximenez (1330-1409), une des figures les plus extraordinaires de l’alchimie catalane du XIVe siècle, fut le conseiller et le confesseur du père de Yolande. Pendant le Grand Schisme de 1378, ce même Eximenis fut au service du pape Benoît XIII, dont il reçut de nombreuses distinctions :
Patriarche de Jérusalem et évêque d’Elne. C’est à Perpignan – où s’était réfugié Benoît XIII – que mourut notre personnage le 23/01/1409. Il fut enterré au couvent des franciscains de la ville. Par ailleurs, les rois d’Aragon furent très favorables au millénarisme réformateur du moine calabrais franciscain, Joachim de Flore (6) ; la Catalogne abritant un nombre important de béguines et de franciscains. (cf : Pou Y Marti, José : Visionarios, béguinos y fraticelos catalanes (siglos XIII.XV), Vich, 1930) Benoît XIII nous est connu pour sa très grande culture livresque et une immense érudition (7) ainsi qu'une obstination frisant l’irréductibilité (8). Il traînera partout sa volumineuse bibliothèque (9) jusqu’à Peniscola. À sa mort, le cardinal Pierre de Foix s'appropriera ce qui subsistait de manuscrits au moment de l’abdication de Clément VIII.
Cependant, comme le reconnaît Gérard Touzeau au sujet du trésor de Benoît XIII p.338 : « Enfin, plusieurs indices laissent penser que des livres et des biens ayant appartenu à Benoît XIII ont franchi, peu après 1430, l’actuelle frontière franco-espagnole. Une poignée de survivants de l’ »Arche de Noé », parmi lesquels Antoine De Camps, les auront entreposés dans quelque cachette oubliée de la région de Perpignan. » Dans la région du Razès ?
L’influence catalane et aragonaise en Languedoc s’affirmera déjà au XIe siècle, lors du mariage de Ramon Bérenger Ier (1026-1076) avec Almodis de la Marche, dame de Lusignan (10) et l’acquisition des comtés de Carcassonne et du Razès.
Benoît XIII put compter sur le soutien indéfectible d’un certain Comte Ramon III de Périllos (11), seigneur et vicomte de Rodès en Aragon et de Périllos en France, seigneur de Millas, de Céret et d'Argelès sur mer (66), Chambrier du Roi Jean d'Aragon et de Majorque (ca 1325-1408..1419)
Le nom de Ramon de Périllos est quasiment inconnu des historiens médiévistes français. Périllos était considéré comme le berceau d’une famille qui a donné au Roi d’Aragon des conseillers très influents. En 1391, le fief de Périllos est érigé en Vicomté, Ramon de Périllos — vassal du Comte de Barcelone — devient Gouverneur du Roussillon, de la Cerdagne, du Capcir et du Vallespir mais également Maréchal d’Aragon et de Sicile.
C’est dans cette famille que quelques années plus tard, un autre Ramon de Périllos accéda aux fonctions de Grand Maître des Chevaliers de Malte (1697-1720) mais on avance que ce fut le seul des grands Maîtres à ne pas être enterré à La Valette. Au cœur de la lande aride des Corbières, se dresse le village déserté d’Opoul-Périllos (12), l’un des lieux les plus énigmatiques des Pyrénées-Orientales. Périllos appartint dans un temps reculé à la puissante famille narbonnaise des Procula, dont une fille, Claudia, native de Narbonne, devint l’épouse de Ponce Pilate. Celle ci fut la protectrice du couple Jésus et Marie-Madeleine et favorisera l’arrivée de Marie-Madeleine en Provence. Précisons que Claudia Procula est vénérée dans les Églises orthodoxes et orientales pour avoir tenté de sauver Jésus, mais pas dans l’Église de Rome !
Les Mérovingiens (13) - à la fois descendants de Mérovée/Merouweg, et les premiers bénéficiaires de l’ "initiation royale" - furent les gardiens attitrés du site mystérieux de Périllos. On en déduira que les vraies origines de la royauté, sur lesquelles le chartreux Polycarpe de la Rivière, l’auteur de l’Histoire des évêques d’Avignon (1638)(14), membre de la Société Angélique, se flattait d’avoir des lumières se situent dans la « Sépulture Royale » où sont réunis les corps éthériques du Couple Sauveur (Jésus-Marie-Madeleine).
Quand Benoît XIII rencontra quelques difficultés en Avignon, Ramon III de Perellós deviendra son lieutenant pour aller à Paris et obtenir pour le pape la protection des troupes du duc Louis d'Orléans, de 1398 à 1401. Celui-ci passera quelques années au service du souverain pontife.
Chambellan du roi Juan Ier d’Aragon, il dut suite à la mort du roi dans des circonstances mal élucidées prouver son innocence en accomplissant un pèlerinage en 1397 en Irlande au « Puits de saintPatrick » associé chez l'écrivain fantastique Gustave Meyrink dans son dernier roman, L’Ange à la fenêtre d’Occident, membre de la Confrérie des Sages du Nord, à l’apparition d’Isaïs (15). En 1397, Ramon et son escouade quittèrent Avignon ou il résidait alors au service du pape Benoît XIII. Il indiquait vouloir s'assurer de ses propres yeux que son ancien et bien aimé roi, Jean Ier d'Aragon, était au purgatoire. Les autres raisons du voyage ne sont pas dites. Ramon est allé, il a vu et il sait. De son voyage aux confins du monde, de ses épreuves et de sa vision dans la grotte, Ramon, comme d'autres avant lui, a fait un récit fabuleux. N'oublions pas qu'en ces temps, merveilleux et véracité sont indissociables. Le manuscrit original en langue catalane (du 14e siècle) est perdu ou caché. On en possède une copie manuscrite en langue romane (occitano catalan) datée de 1466.(cf : Voyage au Purgatoire de Saint-Patrice, publié par Jeanroy et Vignaux, Toulouse 1903, [Bibliothèque méridionale, Tome VIII])
Dès le XIIe siècle, courrait en Europe une légende d'outre-tombe selon laquelle il existait en Irlande, sur une île du lac Derg, une grotte appelée « Purgatoire de Saint Patrick » (16). Ramon de Perellós, accompagné du chevalier Guillaume de Courcy fit le voyage en Irlande où il fut aimablement reçu par le roi Nelan O'Neill. Doté d'un sauf-conduit et d'une escadre de vingt hommes, il se rendit sur l'île, à l'entrée de la grotte. Il fit son testament, assista à une messe pour le salut de sa propre âme et adouba chevalier ses deux fils Thomas et Pere. Ensuite, il entra dans la grotte avec Guillaume de Courcy. Il en ressortira tout émerveillé racontant qu'il s'était rencontré lui-même. Ce lieu d’initiation souterrain restera fort en honneur jusqu’à l’époque de Christophe Colomb. Le Purgatoire de Saint Patrick sera bouché sur ordre des autorités ecclésiastiques le 17 mars 1497, jour de la fête de Saint Patrick, alarmées de voir se perpétuer des mystères dont l’origine était bien antérieure au christianisme.
De cette légende apparemment anecdotique, l’on pourra constater que le symbolisme du « Trou de Périllos » rattrape celui de la Lance graalique et du Méridien de Paris ou méridien de Saint-Sulpice, figure de l’Axe du Monde où l’on retrouve curieusement la Société Angélique.
André Douzet, en bon connaisseur de l'affaire de Rennes-leChâteau, note le rapprochement entre l’aventure de Ramon Perillos et la « chapelle périlleuse » dans le cycle du Graal. D’autre part, dans La Croisade contre le Graal, Otto Rahn établira un rapprochement tout aussi judicieux entre Parilla, le premier roi du Graal selon Wolfram d’Eschenbach et Ramon de Perelha, le seigneur de Montségur. Toujours selon Wolfram von Eschenbach, ce sont les représentants de la Maison d’Anjou alliés aux Templiers, qui détiendront le manuscrit original de Flégétanis.
Le mythe du Graal, mythe solaire et viril procède de la Tradition primordiale d’origine polaire et hyperboréenne. Ce mythe est symbolique et initiatique. L’une de ces versions, en fait la plus magistrale, mais aussi la plus ambiguë car aristocratique fut le Parzifal du poète allemand Wolfram Von Eschenbach (1180-1225) (17). Ce mythe s’ordonne sur un parcours initiatique et alchimique réservé à une élite de moines-guerriers, constitué d’« avancées » spirituelles de « chutes » puis de nouvelles « avancées » pour finalement parvenir à l’« Éveil » et à la « purification » (catharsis) par le fracassement de l’« illusion » (la Maya indo-bouddhique) du héros. L’élément principal de la quête de Parzifal n’est pas tellement de découvrir le Graal, mais de panser le roi blessé pour que le royaume retrouve sa fécondité et son équilibre.
L’Ordre du Temple est une référence constante dans Parzifal. Il induit dans ses thèmes l’idée naturelle et traditionnelle d’une élite et de groupe d’élus préposé à remplir une tâche spécifique, notamment à maintenir une tradition secrète. Des éléments « hétérodoxes » fort gnostiques composent cette quête, de ce fait le Parzival de Wolfram est la plus païenne des versions.
Nous trouvons dans le récit de Wolfram deux figures essentielles du monde de la Tradition. La première est Lohengrin, fils de Parzival et de Condwiramur. Lohengrin, le Chevalier au Cygne, n’est autre que le lorrain Garin … sous l’armure duquel chevaucha la Pucelle (18). Jeanne fut la dernière incarnation virginale de Perceval (19). Sa mission, comme celle de Du Guesclin (20) lui avait été désignée dès son enfance. La seconde, la plus importante n’est autre que le mythique Prêtre Jean.
La présence des Templiers dans le récit de Wolfram s’explique par un idéal plus élevé que celui de la chevalerie séculière et mondaine de la Table Ronde puisqu’ils étaient choisis parmi les plus purs de la Table Ronde. La notion de pureté comme la notion de vengeance est primordiale chez Wolfram. Cette notion de pureté dérange nos contemporains perclus d’égalitarisme n’en comprenant plus la raison et la nécessité. Le propre de l’Initiation étant la réalisation de Pierre philosophale, le passage de la pierre brute (état profane) à la pierre taillée (état d’Éveil ou initié).
Wolfram chante la Maison d’Anjou dans son récit. Wolfram appelle Béalzenan la « capitale de l’Anjou » ce qui évoque irrésistiblement le Baucéant (21) des Templiers que Jeanne arborait lors du sacre de Charles VII à Reims.
La Maison d’Anjou fut définitivement concrétisée par l’affiliation de Foulques V le Jeune, comte d’Anjou à l’Ordre du Temple. Nous ajouterons qu’à l’époque ou Wolfram rédigeait son Parzival, le grand maître du Temple (élu en 1201) était l’Angevin Philippe de Plessiez qui se signalera par sa lutte contre les Maures d’Espagne. Le vocable « Anjou » rappelle Gamuret l’Angevin, père de Parzifal dont la figure héroïque évoque irrésistiblement Richard Cœur de Lion avec comme symbole héraldique la panthère, symbole des plus primitifs des Plantagenêts issus de la Maison d’Anjou (22).
La tradition du Graal nous entretient du concept de Gaste pays, du « Pays désolé » à cause de la perte du Graal, de ce pays stérile qui ne redeviendrait fertile qu’avec la guérison de la blessure du Roi pêcheur, autrement dit Jésus. On considérait que cette blessure se transmettait de génération en génération dans la lignée des rois méhaignés (blessés): les desposynes jusqu’à l’arrivée du 515 dantesque. La blessure emblématique de la tradition du Graal désignait en réalité la perte de la Tradition primordiale du fait de la persécution et de l’éviction des héritiers spirituels par l’imposition d’une souche royale pervertie (les Carolingiens) grâce à l’appui de l’Église de Rome se donnant une succession apostolique aussi imaginaire que frauduleuse. Pour cela il fallait disqualifier MarieMadeleine ! Ce qui fut réalisé en 591 par le pape Grégoire I er. Fusse un stratagème de l’Église visant à ruiner la réputation de MarieMadeleine et, ce faisant, à détruire les derniers vestiges des influences des cultes rendus à une déesse païenne et au Féminin sacré aux premiers temps de l’Église ?
Revenons à Périllos.
Son frère Pons de Périllos, fut le chambellan et le confident de Yolande de Bar, mère de Yolande d'Anjou-Aragon, deus ex machina de l'odyssée johannique. Colette de Corbie, Grande-Maîtresse de l'ordre des Clarisses, tiersordre franciscain lui sera très favorable et réciproquement. Celle ci aurait selon Philippe de Forceville, historien "conformiste", préparé les étapes de Jeanne entre Vaucouleurs et Chinon dans des maisons franciscaines.
L' abbaye de Corbie, d'obédience colombanienne, entretenait des liens avec l'abbaye de Saint-Victor de Marseille. Colette, accompagnée par Henry de Baume, Blanche de Genève, sœur de Clément VII et d’Isabeau de Rochechouart, baronne de Brissay, sera reçu par le pape Benoît XIII à Cimiez petit village sur le territoire actuel de Nice alors administré par la Maison de Savoie. Dès 1406, Colette de Corbie était l’objet d’une véritable vénération de la part de Benoît XIII au point que le pape catalan lui donnant audience se levait de son trône en sa présence et se prosternait même à ses pieds, selon ses hagiographes.
Cimiez, quartier de Nice est un haut-lieu de l’hagiographie des saints Celse et Nazaire, patrons de l’église de Rennes-les-Bains et de la cathédrale de Carcassonne.
Ces saints furent maltraités à Cimiez ou Nazaire baptisa et initia Celse, grand pourfendeur de Chrétiens.
Colette de Corbie était surtout connue comme la « Grande Maîtresse » de l’ordre des Clarisses – qui possédait près de Domrémy, à Neufchâteau, un couvent –, la "section féminine" de l’ordre de Saint François. Elle fut élevée au rang d’abbesse générale de tous les monastères de clarisses par Benoît XIII.
Bien qu’elle eût établi son quartier général à Besançon, Colette de Corbie, grande voyageuse, ne dédaignait pas sillonner le royaume, ainsi que les terres d’Empire, ainsi la Lorraine, pour tenir des "séminaires". Et, Jacques Guérillon, Mais qui es tu Jehanne d’Arc ? Ed.La Pensée Universelle, 1972 d’écrire : « Cette même Colette de Corbie, voyageuse infatigable, ne manquait jamais, à chaque fois que ses pérégrinations la conduisaient dans les parages, d’effectuer une halte à Domrémy et logeait à l’ermitage du BoisChenu où elle convoquait ses adeptes régionales du tiers ordre franciscain qu’elle introduisait dans la règle et l’esprit de l’ordre.
Parmi ces adeptes Jeanne […] reçut, à 18 ans, le grade de "grande dame discrète". »
Assiégé dans son palais d’Avignon, Benoît XIII fera face à l’expédition militaire montée contre lui. Il réussira à tenir cinq ans de la sorte, ravitaillé par les Avignonnais.
Dans la nuit du 11 au 12 mars 1403, Benoît XIII réussira à s’évader du palais d’Avignon et à rejoindre par bateau, Barbentane où une troupe de séides de Louis d’Orléans le conduisit à Châteaurenard, sous la protection du roi de Sicile, comte de Provence, Louis II, époux de Yolande d’Anjou !
Il séjournera à Tarascon, Sorgues, Carpentras. Marseille lui ouvrira ses portes et il résidera par deux fois à l’abbaye fortifiée de SaintVictor. Entre 1403 et 1407 Benoît XIII séjourna à l’abbaye de Saint-Victor de Marseille. Benoît XIII s’y installa le 9 février 1404 et y restera jusqu’au 3 décembre de la même année. Il quitta définitivement Saint-Victor en 1407.
Cette abbaye recelait une importante bibliothèque médiévale (23) qui contenait un nombre impressionnant de documents précieux sur les origines du Templisme (hiérarchie occulte de l’ordre du Temple)(24). Elle se volatilisera curieusement pendant la Révolution française. Selon un érudit marseillais J.A.B Mortreuil, L'ancienne bibliothèque de l'abbaye de Saint-Victor, (1854), une partie importante de la bibliothèque fut donnée par le cardinal Julien de Médicis, abbé de Saint-Victor entre 1570 et 1578 à sa parente Catherine de Médicis (25). Il semble plus que probable que les livres et manuscrits essentiels du Templisme ont disparu chez les moines de Saint-Maur à laquelle appartenait Rabelais et Dom Pernéty. (cf : Alfred Weysen, L’île des Veilleurs p. 260-261 Éd. R. Laffont) Par contre, pour Augustin Fabre, Observations sur la dissertation de M.Mortreuil sur l'ancienne bibliothèque de Saint-Victor, une partie des livres de l'ancienne bibliothèque de Saint Victor fut confiée à Richelieu par son frère aîné Alphonse-Louis (1582-1683), chartreux (26) et abbé de Saint-Victor de Marseille de 1639 à 1653. Tous les deux s'entendaient fort bien. Il semblerait que le frère de Richelieu ait joué un rôle ésotérique de premier plan. En 1635, il se rendit à Rome et y rencontra le mystérieux Nicolas Poussin, lui aussi membre de la Société Angélique, auteur du tableau crypté « les Bergers d’Arcadie ». A partir de là, la carrière de Poussin s’envola. (cf : Arnaud de l’Estoile, Le véritable secret des rois de France p.95 Éd. J’ai Lu)
Est-ce pour ces raisons que Gabriel Naudé (1600-1653)(27), bibliothécaire et espion de Richelieu (28) et Mazarin (qui en savaient long par leurs attaches avec l’abbaye Saint-Victor de Marseille), ira jusqu’à penser que Jeanne n’avait été brûlée « qu’en effigie » ? : « Or ce coup d’État ayant si heureusement réussi que chacun sait, et la Pucelle n’ayant été brûlée qu’en effigie, (...) » (cf : L'estat et succès des affaires de France – Paris 1570 – 1 – II – règne de Charles VI, ad. ann. 1427- 1430 et Histoire générale des rois de France – Paris 1576 – 1 – XXI, règne de Charles VII. )
En 1366, le pape bénédictin Urbain V (Guillaume Grimoard 1310- 1370) réunira à la congrégation de Saint-Victor le monastère de Saint-Honorat de Lérins. La situation de cette abbaye est exceptionnelle à l'époque, elle est un des principaux foyers religieux dans le midi de la France. Elle fut liée de façon organique avec les comtes catalans de Provence. Plusieurs monastères d’obédience victorine apparaîtront en Catalogne vers l’an mil. C’est sous le pontificat de Boniface VIII (1294-1303) que les moines de SaintVictor furent remplacés par des Dominicains de la Maison d’Anjou. Cette abbaye avait des dépendances à Saint-Flour, Mende, Rodez, où se perpétua la lignée des papes de l’Église d’Avignon, Barcelone, Nîmes, Albi, Toulouse, Narbonne, Agde, Tolède (29), un des principaux centres de la vie monastique dans le Midi.
Plus tard, la Congrégation de Saint-Maur (30) reprendra Lérins. N'oublions pas que Dom Pernety (31), célèbre ésotériste alchimisant, membre de la Congrégation de Saint-Maur affranchira Daniel Polluche (1689-1768) auteur de Problème historique sur la Pucelle d’Orléans Orléans, 1749 in-8 sur la survie de Jeanne (32).
Polluche recevra le 31 décembre 1750 une lettre de Dom Pernéty qui est une copie du Mercure de France de février 1725 et qui reproduisait la lettre de Jérôme Vignier, l'oratorien. Le Père Jérôme Vignier, ex-chartreux devenu janséniste de l’Oratoire, mort à Paris en 1661, aurait découvert le contrat de mariage en 1645 (aujourd’hui disparu, comme le Livre de Poitiers !) dans les archives de la famille des Armoises-Sermoise ; son frère Benjamin Vignier, gouverneur du château de Richelieu (33) de 1662 à 1684, relata cette trouvaille dans le Mercure Galant en novembre 1683 un extrait aux pages 39 à 60 de la Revue (lettre de à M. de Grammont).
A propos de La chronique de Metz publiée par dom Calmet dans les Preuves de l’Histoire ecclésiastique et civile de la Lorraine sur le mariage de Jeanne d’Arc, Benjamin Vignier écrivait : « après la mort du P. Vignier, l’Original de cet ancien Manuscrit eut la même destinée que tous ceux dont il est parlé dans l’éloge que le P. Dachery (34) a fait de lui ; mais comme il pourroit faire découvrir ceux qui se sont emparez des autres à mon préjudice, je ne m’attends pas qu’on le mette en lumiere tant que je serai vivant » (lettre du 2 novembre 1683 à M. de Grammont, publiée dans Mercure de France, février 1725, p. 249).
L’original de ce contrat de mariage entre Jeanne et Robert des Armoises se trouvait encore à Fresne-en-Woëvre avant 1914, chez le notaire successeur de Maître Marty. Albert Bayet, professeur à l’École des Hautes Études, affirmera l’avoir eu entre les mains en 1907. Ce contrat a été compulsé par des personnalités tels, le président Édouard Herriot et le comte de Labessières.
Évidemment, Vignier comme Polycarpe de la Rivière sont considérés comme faussaires par la maffia « orthodoxe ».
On retrouve l’initié Rabelais dans l’histoire de la bibliothèque templiste provençale de Saint-Victor de Marseille. Un des écrits de Rabelais se rapporte curieusement à la bibliothèque de l’abbaye disparue étrangement et dont il donne une énumération humoristique. Un autre homme d’État d'envergure lié à Saint-Victor est Mazarin, disciple de Richelieu et donc au fait de certains des plus hauts secrets d’État.
Mazarin fut abbé de Saint-Victor de 1653 à 1661. Toujours d’après Jean Robin, (cf : Ibid- p.197) Mazarin fut un contre-initié notoire. Celui-ci possédait toutes les versions du Songe de Poliphile dont nous parlons dans notre article sur Béroalde de Verville car élevé chez les Colonna. Le père de Mazarin était au service de Philippe Colonna, grand connétable du royaume de Naples. Mazarin était féru de belles lettres, fréquentant les grands et leurs œuvres. A commencer par les descendants des Médicis dont certains font partie de la cour royale de France. L’une de ses nièces, Marie Mancini, amour de Louis XIV, épousera Laurent Colonna, prince de Castiglione. (cf : Jacques Rolland, Versailles, le rêve maçonnique d’un roi Ed.Trajectoire, 2014)
En 1973, Pierre de Sermoise découvrit à la Bibliothèque Mazarine un curieux document. Il s’agit du manuscrit n°1999 (clin d’oeil au 666 apocalyptique !), pièce 1, transcrit par un des secrétaires de Mazarin. En voici le passage : « Tout le fait de la Pucelle d’Orléans n’estoit qu’une finesse politique, inventée par les Courtisans de Charles VII, pour retirer ce Prince de ses amours avec Agnès Sorel ; & dautant que cela se fit au nom de la Religion, & comme par miracle , tout le peuple de France y accourut comme au feu […]. Tout ce qui se lit dans les historiens ordinaires de la Pucelle d’Orléans, n’est qu’un Romant : en, quoy il n’y a pas plus d’apparence de vérité qu’en tout ce qui se dit de la Papesse Jeanne » (cité par Robert Ambelain, Drames & secrets de l’Histoire p.177 Ed.R.Laffont)
Benoït XIII se réfugiera à Perpignan, alors en terre aragonaise. Il tint un concile en l’église de La Réal du 15 novembre 1408 à Perpignan au 26 mars 1409 avec 13 sessions et 300 pères. La 14e session se tint elle le 26 mars1409 au Palais des rois de Majorque. Ce concile ne fut officiellement pas scellé, comme si une ultime session restait à opérer.
On trouvera la présence des plus hauts dignitaires de l’ordre de Malte (successeur de l’ordre du Temple) au concile de Perpignan. Parmi les Français du Nord qui assisteront au concile, deux prélats lorrains, l’évêque de Toul (Domrémy dépendait ecclésiastiquement de l’évêché de Toul) et le procureur de l’évêque de Metz. (cf : Gérard Touzeau - opus cité - p.75)
En déposant Benoît XIII, l’illégitime concile de Constance opérera une mutation importante de la chrétienté latine. Ce concile ne fit qu’accroître la confusion. Il était d’autant plus illégitime qu’il n’avait strictement aucun titre à faire valoir pour déposer et nommer des papes, puisque la théologie catholique enseigne expressément que le Pape est supérieur aux conciles. Le concile de Constance se crut même obliger de rédiger les « Quatre Articles » qui proclamaient la supériorité du concile sur le Pape. Les docteurs en théologie proches de l’Université favorables au conciliarisme se sentant «coupables» envoyèrent une délégation à Benoît XIII à Perpignan et le reconnurent publiquement comme vrai et unique pape de la chrétienté, mais l’adjurèrent néanmoins de renoncer à la tiare pour ramener l’unité ! C’était faire prévaloir les intérêts politiques sur les décrets de l’Esprit-Saint et Benoît XIII ne pouvait évidemment accepter cette proposition parfaitement hétérodoxe au regard de la Tradition universelle de l’Église, et cela d’autant plus que l’assemblée qui l’avait formulée n’avait même pas le caractère de concile œcuménique, et que les votants n’avaient pour la plupart aucun pouvoir délibératif régulier. Les « Quatre Articles » étaient donc à tous égards frappés d’une absolue nullité.
L’Église s’est tirée du schisme en violant trois règles : l’autorité d’un pape canoniquement élu est supérieure à celle d’un concile. La démission d’un pape est canoniquement illégale, nul (pas même un concile) ne peut juger un pape canoniquement élu. Ces trois règles sont des fondements de la réforme grégorienne. Le fait que l’Église elle-même ait du violer ces règles donnera naissance au conciliarisme qui sera la terreur des papes au XVIIIe siècle. En 1678, le Père Louis de Mainbourg, auteur du Histoire du Grand Schisme d’occident, Paris 1678 & 1681 fustigera « ces écrivains emportés qui traitent encore de schismatiques […] ceux qui étaient dans une obédience qu’ils n’approuvent pas [ne sont] que de faibles déclamateurs, qui osent décider de leur autorité particulière […] ce que l’Église même n’a pas jugé qu’elle dût déterminer... »
Le Grand Schisme prit fin avec l’abdication de Clément VIII, l’ « élu simoniaque » protégé du roi d’Espagne, et finalement abandonné par ce dernier (35). Restait donc en lice, Martin V de Rome, officiellement du moins, mais dans l’ombre, se survivait Benoît XIV qui lui n’avait pas abdiqué. Mieux, Il avait nommé des cardinaux secrets qui, à sa mort, donnèrent à l’Église un nouveau représentant. Et ainsi en fut il jusqu’à nos jours, et en sera t’il jusqu’à la fin des temps. Car le Christ-roi a dit de son Église, de sa véritable Église, que les portes de l’Enfer ne prévaudraient pas contre elle.. Et si tout laisse penser que Rome doit être détruite… c’est bien qu’Avignon est toujours fidèle…

NOTES

(1) 1328 est un millésime remarquable : début de la dynastie des Valois, de la Guerre de Cent-Ans, basculement dans le versant ténébreux de Rennes-le-Château, transfert du Graal pyrénéen dans le centre portugais islamo-chrétien de Sarras et naissance de Pedro de Luna, premier titulaire de la papauté cachée.

(2) Certains des rois d’Aragon furent enterrés à l’abbaye de San Juan de la Penà, où fut conservé durant des siècles le calice d’origine orientale du Graal. Les premières mentions du calice, sous sa forme actuelle, remontent à 1399, en pleine époque de Benoît XIII. Le calice est aujourd’hui encore vénéré en la cathédrale de Valence (Espagne).

(3) C’est en 1595 qu’un moine bénédictin originaire de Douai, Arnold de Wion publia à Venise un livre intitulé Lignum Vitae (l’arbre de Vie) consacré à tous les membres de son Ordre, parmi ceux-ci, il faisait figurer saint-Malachie. Arnold de Wion donnait comme venant de saint Malachie qui les aurait composées en 1139, 111 devises latines suivies d’une formule évoquant le dernier pontificat, la destruction de Rome et la Fin des Temps.
Dans l’ésotérisme, le chiffre 111 évoque le Pôle. René Guénon évoque le 111 dans le chapitre XV, « Un hiéroglyphe du Pôle » p.111 (heureux hasard de l’impression ?) dans Symboles fondamentaux de la Science sacrée Éd.Gallimard. Ce nombre est en rapport avec la lettre hébraïque א et avec le tétramorphe dans la symbolique chrétienne. Ce nombre représente l’unité exprimée dans les trois mondes (hylique, psychique, spirituel), ce qui convient parfaitement pour caractériser la fonction même du Pôle, du Centre suprême et de la Tradition primordiale. La fin de la papauté romaine signifiant la restauration de la Tradition primordiale.

(4) Pedro de Luna sera déposé publiquement au Concile de Constance, le 26 juillet 1417.
« Pedro de Luna, appelé Benoît XIII, a été et est parjure, cause de scandale pour l’Église universelle, fauteur et attiseur d’un schisme invétéré, d’une séparation invétérée et d’une division de la sainte Église de Dieu, obstacle à la paix et à l’union de cette même Église, perturbateur schismatique, hérétique s’écartant de la foi, violeur obstiné incorrigible, notoire et manifeste de l’article de foi (...) » Cette disposition s’accompagnera de l’interdiction faite à tout fidèle de continuer à lui obéir sous peine de poursuites. Bien malgré elle, l’Aragon se rangera derrière cette décision. Le Grand Schisme sera officiellement clos le 11 novembre 1417. Ce schisme aura duré 39 ans

(5) « Le siège de la puissance navale en Méditerranée de l’Ordre [du Temple] fut Majorque. » (cf : Marylin Hopkins, Graham Simmans, Tim Wallace-Murphy, Rex Deus p. 120 Éd.Du Rocher, 2000) Confisqués ses biens échurent à l'Ordre de Malte sauf en Espagne où ils iront à l’ Ordre de Montesa. A l’époque du pape Benoît XIII, la Grand-Maîtrise était entre les mains de Romero de Corbera. Consacré à la Vierge Marie, il était d’obédience cistercienne. Il était étroitement lié à l'Ordre des Chevaliers de Calatrava. (6) Fils d’un notaire calabrais, Joachim de Flore fut tour à tour page à la cour de roi de Sicile, puis abbé cistercien, il prêcha la rigueur monastique et fonda l’ordre de Saint-Jean-de-la-Fleur. Dante, le grand initié de la Fede Santa, l’évoquera dans son Paradis « la flamme de l’abbé calabrais Joachim en qui souffla l’esprit de prophétie ». Il fut surnommé par ses contemporains « l’ange du premier jour ». Il relancera le mouvement millénariste en développant la théorie des trois âges spirituels.

(7) Comme le rapporte Le Religieux de Saint-Denis, « au dire des gens de savoir, il surpassait en éloquence les plus fameux docteurs » (Tome II, livre XVI, p.263)

(8) Ses adversaires ont recherché des témoins contre lui dans les pays soumis au Concile, c'est-à-dire dans presque toute la chrétienté, et personne n'a osé témoigner contre sa vie privée ou contre l'honnêteté notoire avec laquelle il avait administré les biens de l'Église. Ils ont tous reconnu tranquillement ses coutumes austères, son mépris pour l'argent, sa haine du népotisme, car il n'avait jamais favorisé ses neveux avec des cadeaux extraordinaires. La seule accusation sérieuse contre lui : “son obstination à ne pas renoncer à la papauté”.

(9) La bibliothèque de Benoît XIII est connue pour être l’une des plus riches du XIVe siècle. Sa bibliothèque pontificale comptait plus de deux mille volumes, selon l’inventaire effectué après sa mort. (cf : Marie-Henriette Julien de Pommerol, MH & Monfrin, J., La Bibliothèque pontificale à Avignon et à Peniscola pendant le Grand Schisme d’Occident et sa dispersion : inventaires et concordances, Rome-Paris, 1991)
Parmi les livres que Benoît XIII traînaient avec lui, citons le manuscrit de Yves de Lessines, abbé de Cambron en Flandres. On sait par Rudy Cambier, L’œuvre du Vieux Moine Tome 1, le dernier chemin des Templiers Éd.Louise Courteau, 2010, professeur de philologie et spécialiste linguistique de la période moyenâgeuse que Benoît XIII était féru de livres d’alchimie et des Templiers et qu’il reçut d’un des successeurs d’Yves de Lessines, l’abbé André de Bruxelles, un livre sur le secret des Templiers. Cet ouvrage passa ensuite entre les mains du cardinal-légat Pierre de Foix pour se retrouver auprès du grand-père de Nostradamus qui le transmettra à son petit-fils Michel de Nostre-Dame dit Nostradamus. Les Centuries de Nostradamus sont truffées d’expressions du bas Moyen Âge et de mots picards, ce qui est étonnant pour un livre censé être écrit par un Provençal du 16e siècle. Ces anomalies seront le point de départ des recherches de Rudy Cambier qui le mèneront à une conclusion étonnante : Les Centuries de Nostradamus ne sont pas des prophéties (on s’en doutait un peu !) mais l’histoire, sous forme d’énigmes, de l’Ordre du Temple et de sa destruction par Philippe le Bel, un vendredi noir de l’an 1307. »
Leur véritable auteur n’est pas Michel de Nostredame mais Yves de Lessines, quinzième abbé de Cambron, l’ouvrage étant signé dans un des quatrains… et surtout, le texte a été écrit dans les toutes premières années du quatorzième siècle !
Ces célèbres quatrains dont le caractère sibyllin peut prêter à de nombreuses interprétations, auraient été composés entre 1323 et 1328 par un moine cistercien du nom de Yves de Lessines, prieur et quinzième abbé de l’abbaye de Cambron, entre Mons et Ath, à la frontière belge donc, et révélerait l’emplacement d’un trésor templier. Tout ceci montre le grand intérêt de Benoît XIII pour la cause des Templiers et le lie probablement à la survivance occulte de celui-ci ! (https://youtu.be/b72MgfbB3yQ)

(10) La famille de Lusignan est indissociablement liée au mythe de la fée Mélusine. C’est Jean d’Arras qui rédigea l’Histoire de Mélusine à la demande du duc Jean de Berry pour sa soeur, Marie, duchesse de Bar (1344-1404), épouse de Robert Ier duc de Bar et suzerain de Stenay, capitale mérovingienne. Dans le mythe de Mélusine, Raimondin de Lusignan, son mari, surprend le secret de Mélusine un samedi, jour consacré à Saturne, dieu de l’Age d’Or. Pour cela, il sera cloîtré à Montserrat en Aragon. Rabelais nous signale la légende de Mélusine dans le Quart Livre : « Après boire, visitez Lusignan, Parthenay, Vovant, Mervant et Pouzauges en Poitou. ». Henri Dontenville, le célèbre folkloriste, dans sa France mythologique faisait de Mélusine la parèdre de Gargantua. Mélusine ou la femme-serpent est une hypostase de la Déesse-Mère ou de la Shekinah hébraïque autrement dit de la kundalini. Que les rois d’Aragon se voient associer à ce mythe serpentiforme ouvre bien des perspectives ésotériques insoupçonnées des profanes. Mélusine est le Soleil Noir de la régence cachée irradiant les contours de l’épopée johannique.

(11) Ramon de Périllos épousa une Violentina de Luna. En l’état actuel de nos recherches, nous ne pouvons dire si elle était liée à Pedro de Luna.

(12) Le 19 novembre 1971, Périllos est rattachée à Opoul pour former la commune d’Opoul-Périllos. Son matricule postal est 66600 ! Certains prétendent que le trésor de l’abbé Saunière de Rennes-le-Château y serait caché. On peut suggérer qu’en vérité le “trésor” de Béranger Saunière recèle un “savoir volontairement obscurci par l’Eglise” lié à Marie Madeleine et Jésus.

(13) Les Mérovingiens témoignaient d’une spiritualité voisine de celle des Druides. Ils manifesteront une grande défiance envers la papauté et favoriseront une Église Gallicane représentée par l'épiscopat et plus encore par des abbés supérieurs des abbayes. La dynastie mérovingienne par ses origines mystérieuses, les légendes qui entourent les premiers rois francs tels Pharamond, Clodion le Chevelu, Mérovée, Childéric Ier et même Clovis, cette dynastie apparaît comme une résurgence de ce vieux mythe du roi perdu, roi revenant qui annonce le retour de l'Âge d'Or, celui de la Connaissance. En fait, la grande trahison de l’Histoire de France et des historiens a été de considérer les Mérovingiens comme des barbares, des païens, que l’Église Catholique Romaine avait civilisé par la cérémonie du baptême de Clovis faisant de cette manière la France « fille aînée de l’Église ». Or, à cette époque, l’évêque de Rome, bien que l’un de ses prédécesseurs se soit déclaré « pape », c’est-à-dire chef suprême de l’Église catholique, ou universelle, ne représentait finalement rien de plus que l’une des diverses formes du christianisme. Cette église romaine n’avait pas plus de puissance que l’Église celte ou irlandaise, pas plus que l’Église gallicane, représentée par l’épiscopat du Regnum Francorum, et n’était pas entouré de plus de considération qu’une quelconque autre forme de christianisme, tel que l’arianisme des Goths, niant la divinité du Christ. A ce titre, on est même en droit de se poser la question de savoir si les Francs comme les Saxons et la plupart des peuples germaniques ou scandinaves n’étaient pas, eux aussi, « ariens » ! Ce serait donc pour une question de politique visant à s’approprier le royaume Wisigoth de Toulouse et son trésor conservé dans le Razès, que Clovis se serait converti au catholicisme reconnu par l’épiscopat des Gaules sans que pour autant l’évêque de Rome ait été partie prenante dans cette affaire.

(14) Livre interdit par la sectaire Rome. Polycarpe de la Rivière entretint une correspondance avec Honoré Bouche, historien de la Provence et biographe de Marie-Madeleine, Nicolas Claude Fabri de Pereisc, avocat de Galilée et ami de Tomaso Campanella, le rosicrucien protégé par Richelieu, le Père Joseph et Nicolas Poussin.

(15) Jean Robin, H.P.Lovecraft & le secret des adorateurs du serpent Éd. Guy Trédaniel, 2017

(16) Une légende prétend que Saint-Patrick séjourna deux ans à l’abbaye de Lérins auprès de Saint-Honorat (350-429) avant de partir évangéliser l’Irlande avec Loup de Troyes, un ancien moine de Lérins et beau-frère de Saint-Hilaire. Fils d’un diacre, saint Patrick (385-461), celte, sera capturé par les pirates. Libéré, il séjourne au monastère de Saint-Honorat, puis à Auxerre, où il sera ordonné prêtre par saint-Germain d’Auxerre. En 431, il s’installera en GrandeBretagne avant de s’installer en Irlande dont il devint le saint-patron.
Son enseignement s’écarte de celui de Rome, et les influences ariennes et nestoriennes sont nettement perceptibles dans ses œuvres. En butte aux autorités ecclésiastiques il se consacrera à l’Église celtique.
Les îles de Lérins furent de ce fait liés à la fondation du monachisme breton. Tous les plus grands évangélisateurs de la Chrétienté passeront par Lérins, notamment Saint-Augustin délégué par le pape Célestin pour évangéliser l’Angleterre. Si c’est à Rennes-leChâteau que l’on célèbre avec le plus de ferveur le culte de sainte Marie-Madeleine, il ne faut pas oublier la dévotion qui entoure sa tombe, sise à Saint-Maximin, et gardée par les moines cassianites.
L’innovation monastique de Cassien et de ses continuateurs (saintBenoît de Nursie) fut de soustraire la vie monastique à l’autorité de la hiérarchie ecclésiastique. Jean Cassien déclarait : « les moines doivent à tout prix éviter les évêques ». C’est à Saint-Victor que naîtra le culte de la Vierge.

(17) Fustigeant l’esprit élitiste qui préside à la quête du Graal, notamment dans ses versions allemandes, Jean Markale, qui, s’il fut un grand barde moderne, ne semble pas s’être débarrassé de préjugés modernes et démocratiques, écrira dans Brocéliande & l’énigme du Graal p.207 : “[…] le Parzival de Wolfram von Eschenbach appartient à une lignée d’œuvres dans lesquelles se manifeste un état d’esprit douteux et qui sont responsables d’avoir alimenté les pulsions racistes d’une certaine humanité. Le concept de race pure est certes une utopie, mais dans Parzival, il est haussé au rang de dogme primordial : les Templiers, gardiens du Graal, sont en droit d’écarter et d’éliminer tous ceux qui voudraient s’approcher de la pierre merveilleuse sans que leur nom figurât sur la dite pierre. »
« Wolfram von Eschenbach, en complétant l’histoire du Graal de cette façon, avait connaissance de l’existence d’une “société secrète”, quelle qu’elle fût, détentrice de secrets qu’elle gardait jalousement et dont elle se servait pour dominer le monde sans que ce monde pût en prendre conscience. Autrement dit, pour Wolfram, la collectivité réunie autour du Graal avait un pouvoir occulte destiné à dominer souterrainement l’humanité. » (cf : Les Dames du Graal p.224 Éd. G.Watelet)
Cependant, René Guénon, dans une note infrapaginale de son chapitre sur « Le Saint Graal » in Aperçus du l’ésotérisme chrétien Éd. Traditionnelles, nous invite, à la suite d’Arthur EdwardWaite, à reconsidérer la valeur et les enseignements des versions allemandes de la légende du Graal. Alors, Guénon, « Supérieur Inconnu » élitiste, partisan du concept de la race pure ?

(18) Le mythe de Lohengrin, vraisemblablement d’origine hyperboréenne et nordique, a été localisé dans le Brabant et dans les Ardennes, sur les domaines de la famille de Godefroy de Bouillon considéré par le Prieuré de Sion comme son fondateur. En 1077, il aurait conquis la cité royale mérovingienne de Stenay, à l’évêque de Verdun. Il vendit alors ses biens, en 1096, Bouillon et Stenay pour aller conquérir le Saint-Sépulcre de Jérusalem qu’il prit le 14/07/1099. Il se vit offrir le trône du nouveau royaume par un conclave rassemblant des Inconnus, mais dont les chefs comme les moines d’Orval étaient d’origine calabraise.

(19) Comme le dit excellemment Robert Ambelain – opus cité – p.140 : « […] tout se passe comme si on avait préparé de longue date sa sortie de l’anonymat, et monté d’avance tout un scénario destiné à galvaniser le pays en faveur de Charles VII. »

(20) Sur la face lumineuse de Bertrand Du Guesclin voir Jean Robin, chapitre Perceval in Le Royaume du Graal : Introduction au mystère de la France Ed.G.Trédaniel, 1992

(21) L’étendard de l’Ordre du Temple ou Baussant est formé de deux parties, la noire et la blanche symbolisant les deux phases de l’alchimie dénommées en latin nigredo et albedo. Or, la guématrie de ces termes - nigredo (14+9+7+18+5+4+15)= 72 et albedo (1+12+2+5+4+15) = 39 – nous donne 111, chiffre du Pôle dans l’ésotérisme de la Tradition polaire. Un groupe de mathématiciens a relevé que la totalité des chapitres des quatre Évangiles était de 89. En ajoutant les 22 chapitres de l’Apocalypse on obtient le chiffre du Pôle, 111 !

(22) Les Angevins historiques avaient la panthère comme héraldique. Une panthère de sable (venant du sanscrit çabala, çavala, tacheté, bariolé). Selon Robert Viel, La « panthère héraldique » et le « Parzival » de Wolfram d’Eschenbach Ed.Archivum héraldicum - La panthère constitue le sceau le plus ancien de la Commune de Rouen comme on peut le voir sur le sceau de Douet d’Arcq 5717. La panthère renvoie à Nemrod dont nous parlons longuement dans notre ouvrage, Le Chemin d’Esaü (aperçus sur l’initiation sacerdotale) Ed.Edilivre-Aparis, 2019. Henry II Plantagenêt avait dit-on les cheveux roux et les cheveux de Richard Coeur de Lion tenaient « le milieu entre le rouge et le jaune ». (cf : John Harvey, Les Plantagenêts, p. 5 et 27 Plon, 1960). Les contemporains attachaient beaucoup d’importance à ces indices physiques comme témoins de réalités supérieures.

(23) Un chanoine de Saint-Victor, au XVIIIe siècle, Thomas le Fournier (1675-1743) avait entretenu ses collègues de l’Académie de Marseille du sort de la bibliothèque médiévale de son monastère. Curieusement, sa conférence dissertation sur l’ancienne bibliothèque de Saint-Victor est disparu.

(24) « C’est de celle ci que sortit la fameuse règle composée de 72 articles qui servit à la création de l’Ordre du Temple. « (cf : Alfred Weysen, L’île des Veilleurs p. 130 Éd. R. Laffont)
Cette Règle primitive composée en latin est conservée à la Bibliothèque Nationale. Plusieurs aveux de Templiers plaident aussi en faveur d’une Règle secrète de l’Ordre que Geoffroy de Gonneville, précepteur pour l’Aquitaine et le Poitou, attribua à un certain Roncelin de Fos (1205-1280).
Roncelin de Fos fut membre de la mystérieuse confrérie de l’ordre des Rois Mages dont les seigneurs de Baux étaient les dirigeants en Provence. Ce même Roncelin de Fos fut de son vivant vassal des rois de Majorque, lesquels relevaient des rois d’Aragon. On trouve dans Nostradamus la description du cachet des seigneurs d’Hyères de la maison de Fos, « race très noble et très puissante de Provence. »
Autour de la famille de Baux, nous retrouvons Gervais de Tilbury, alias Kyot le Provençal que l’on reconnait dans le Parzival de Wolfram Von Eschenbach. Selon Jean Pierre Schmitt, « Les statuts secrets de l’ordre des Templiers » sur le site Rosa Mystica, Roncelin de Fos était favorable à une politique gibeline.anti-cléricale.
Le lecteur aura remarqué l'évocation du nombre symbolique de 72, signature des véritables inspirateurs de cette Règle par les Supérieurs Inconnus de l'Ordre. L’un de ces Supérieurs Inconnus récents, Georges Israël Monti travailla durant la grande guerre à la Bibliothèque Municipale d’Orléans, l’une des plus riches de France dans le domaine maçonnique et occultiste. Élève des Jésuites à Avignon, il fut secrétaire de Joséphin Péladan, lié à la Rose-Croix de Toulouse à laquelle était affilié Bérenger Saunière, et mentor et maître spirituel de Pierre Plantard de Saint-Clair, fondateur du Prieuré de Sion dans sa mouture récente. « Le Prieuré de Sion doit en effet beaucoup à Monti, et accessoirement, à la bibliothèque municipale d’Orléans » (cf : Jean Robin, Le royaume du Graal p.52 Éd.G.Trédaniel)
En 1924, avec Gaston Demangel, collaborateur du Voile d’Isis aux côtés du Maître René Guénon, il fonda le « Groupe Occidental d’Études Ésotériques » où il se faisait gloire de faire l’éloge du Rite Égyptien : « rares savants dont la Fraternité plusieurs fois séculaire et répandue sur tout le globe n’atteint pas un total de 80 individualités, [= les 72] toutes occupées aujourd’hui aux travaux prodigieux d’une Rénovation religieuse et à poser à travers les États d’Occident les assises d’une paix durable ». Ce groupe comprenait une loge féminine : la Loge Isis. Monti tint ces propos fort sybillins : « la Femme fut le véritable Sauveur de la France en la personne de Jeanne d’Arc et des trois cents tertiaires de l’Internationale franciscaine. »(cf : Arnaud de l’Estoile, Ibid - p.298)

(25) Catherine de Médicis arborait un talisman ou gemme figurant Abrasax/Abraxas. Le motif des « abrasax à tête de coq » se retrouvera gravé sur le sceau du Grand Maître de l’Ordre du Temple. Abrasax, Abracax ou Abraxas est une entité gnostique qui préside au 365 jours de l'année (365 étant sa valeur arithmosophique).
Abrasax est un dieu polymorphe au corps d’homme à tête de coq et dont les jambes sont des serpents, il est vêtu d’une armure et tient un fouet et un bouclier.Quant aux deux serpents en forme de jambes, ils représentent les deux aspects du dieu Seth, ainsI qu’en témoigne le nom secret d’Abrasax : Abreaxaamem, c’est à dire, en watan ; l’ancienne langue de l’Atlantide devenue celle de l’Agarttha, le Centre spirituel caché : « Celui qui passe à travers Seth ». Le dieu égyptien à tête d’âne étant considéré comme la dynamis d’Abrasax, son hypostase « opérative ». Sa fonction se devait d’être secrète, voire inavouable car elle avait pour fonction symbolique de concilier l’élément divin et l’élément diabolique.
Abrasax contrôle secrètement les monothéismes abrahamiques avant de les faire imploser selon la démarche sabbato-frankiste de Jacob Frank.

(26) Les Chartreux s’efforceront de reprendre l’idéal d’érémitisme des moines égyptiens des cassianites. Les Chartreux forment un ordre religieux contemplatif des plus sévères. Leur goût de la solitude, leur habitat, leur façon de concilier l’érémitisme et la vie communautaire rappellent ceux des Thérapeutes chers à Philon d’Alexandrie. Les armes de l'ordre représentent un globe surmonté d'une croix entourant sept étoiles.

(27) Surnommé le « grand ramassier » de livres. Il réussira à créer une bibliothèque de plus de 40 000 livres la plus importante d’Europe. En 1642, il quittera Rome pour se mettre au service d’abord de Richelieu puis Mazarin et de sa bibliothèque. Il est l’ auteur d’Instruction à la France sur la vérité des Frères de la Rose-Croix, Paris, 1623.

(28) Richelieu est un des hommes d’État des plus mystérieux et ambiguë. Derrière Louis XIII, le cardinal joua toujours le rôle de guide et de conseiller. Chacun savait fort bien que Louis XIII abandonnait pratiquement au cardinal toute conduite des affaires du royaume. Richelieu avait affirmé avec ironie que les gens seraient bien étonnés s'ils pouvaient apprendre l'identité du véritable "souverain" de la France. A ses côtés, François Le Clerc du Tremblay, dit le Père Joseph, son éminence grise à la tête de sa diplomatie secrète, représentant des Rose-Croix auprès du Cardinal. Rares étaient les actes que prenaient Richelieu sans les soumettre à l’acquiescement préalable du Père Joseph. Richelieu poursuivra un triple but politique au service de la « contre-initiation » : briser les Protestants en France, mater la noblesse frondeuse, et à l’extérieur ruiner la Maison d’Autriche catholique et ultra-montaine en s’appuyant sur les pays protestants étrangers.

(29) « C’est à Tolède, précisément, que nous situerons l’origine géographique du culte de Marie-Madeleine.» (cf : Paulette Duval, La pensée alchimique & le conte du Graal p.153...213 Éd. Honoré Champion, 1979 ) Tolède - écho, comme Toulouse, de la Tula primordiale désignant la « contrée suprême » - fut un centre important pour les religions abrahamiques. Wolfram d’Eschenbach, l'auteur le plus ésotérique des versions du Graal y situe d’ailleurs l’origine de son Parsifal. C’est de Guillaume de Tolède que Wolfram d’Eschenbach tenait l’histoire du Saint-Graal.

(30) Sous l’impulsion de Richelieu, qui menait une politique nettement gallicane, la Congrégation de Saint-Maur connut une forte expression dans le milieu du XVIIe siècle. Les Mauristes militaient pour un pouvoir papal inexistant et rêvaient d’un retour aux origines vers une Église primitive. La Réforme protestante ainsi que le Jansénisme suscitèrent leur intérêt. La Franc-Maçonnerie attira de nombreux moines mauristes dont Dom Pernéty. C’est l’aile gallicane de la Congrégation qui incitèrent de nombreux mauristes à rejoindre la Franc-Maçonnerie.
C’est avec un certain plaisir que le Saint-Siège prit acte de l’acte de désagrégation de la Congrégation en 1790. C’est ainsi que la Révolution accomplit le plus cher vœu de Rome sans que le Vatican ne puisse être suspecté de quoi que ce soit. C’est ainsi, nous semble-t’il, que l’émancipation d’une Église gallicane, à l’instar de l’Église anglicane, fut avortée par une Révolution qui arriva à point nommé pour sauver les intérêts de Rome.
(cf : Dom Yves Chaussy, Les Bénédictins de Saint-Maur 2 Tomes Éd. Études augustiniennes, 1989)

(31) Dom Pernéty est né à Roanne le 23 février 1716. Il prononça ses vœux le 29 juin 1732 à Clermont en l’abbaye Saint-Allire comme bénédictin, où son oncle, l’abbé Jacques Pernéty, chanoine à Lyon, l’avait fait admettre au sein de la Congrégation bénédictine de Saint-Maur, puis à l’abbaye de Saint-Germain des Prés où il acquit une très vaste érudition et découvert des documents précieux. Il fut reçu dans « le Chapitre de Clermont » fondée en 1754 par Christophe de Bonneville et situé au Collège de Clermont des Jésuites. Il fréquenta la « Loge Saint-Jean » à Avignon fondée par le Marquis de Vezenobre, lui-même initié par l’Écossais jacobite Milord, comte de Balmerino, grand maître de toutes les loges d’Angleterre.
Avignon, la ville des papes, fut au XVIIIe siècle l’un des principaux foyers de la maçonnerie française. Ce fut aussi l’un des premiers, puisqu’une loge y fut établie dès 1737. Bien que possession pontificale, Avignon était une ville cosmopolite et la société avignonnaise de caractère assez libre. La cité était accueillante aux étrangers, qui y venaient en grand nombre en raison de sa position et de son climat.
Il y avait parmi eux beaucoup d’Écossais partisans des Stuarts chassés du trône d’Angleterre. Jacques III Stuart lui-même y avait passé près d’un an, d’avril 1716 à février 1717. Son fils, le prétendant Charles-Édouard, y séjourna également à plusieurs reprises. De composition aristocratique, la loge compta parmi ses membres le marquis de Labaume, futur comte de Luze, le chevalier de Mirabeau, père du marquis de Mirabeau, le comte de Quinson, Ignace de Guillen, le marquis de Merle de Beauchamp, l’abbé de Crillon, le comte de Villeneuve, le marquis de Véry, le marquis de Malijac, toute l’aristocratie avignonnaise. En 1783, il doit quitter la Prusse et retourner à Valence en France chez son frère qui lui fit connaître le Marquis Vernetti de Vaucroze ou Valcroz, propriétaire à Bédarride d’un château. Ce dernier lui offrit une maison où Pernéty put rassembler ses disciples de son « Rite Hermétique de Perfection » ou Rite d’Avignon : le docteur de la Richaudière, le Comte de Pasquini-Montresson, le marquis de Beaufort, le Baron de Corbéron, ami de Cagliostro, la duchesse de Wurtemberg, amie de Lavater et de Claude Louis de Saint-Martin, le Baron de Staël (ambassadeur de Suède), le duc Charles de Sudermanie, le Comte de Divonne, Silverhielm, l’abbé Philibert Guyton de Morveau.
Il s’inspira, dit-on, de Cagliostro pour mettre au point son « Rite Hermétique de Perfection ». Son Rite d’Avignon connaîtra son apogée de 1788 à 1792. Celui-ci eut une grande influence sur la vie maçonnique du XVIIIe siècle, au point que le monde maçonnique réclamât beaucoup les avis de Dom Pernéty. On lui attribue l’usage du bonnet phrygien portés par les hordes révolutionnaires.
De son escale à Montevidéo en Uruguay, aurait-il eu à connaître la « Société de Celui Qui Doit Venir » créée en 1735 ?

(32) Né en 1689 à Orléans, Daniel Polluche est l’auteur de Problème historique sur la Pucelle d’Orléans (1749). Membre de la Société littéraire d’Orléans, il est un des tout premiers à évoquer la thèse de la survie de Jeanne d’Arc. Il eut une influence sur le bénédictin Dom Duplessis, bibliothécaire à la ville d’Orléans en 1723 qui lui passa quelque temps à l’abbaye de Saint Germain des Près.
(33) L’auteur des contes de la Mère L’Oye, Charles Perrault, membre à la fois de la Société Angélique et de la loge maçonnique pionnière « Les Chevaliers Errants » (la guématrie de Perrault [16+5+18+18+1+21+12+20] donne 111), tenait Jérôme Vignier en haute estime : Les Hommes illustres qui ont paru en France pendant ce Siècle : avec leurs Portraits au naturel, tome. II, Paris, 1700, p. 18. Il faut dire que Vignier était fort érudit puisqu’il est l’auteur de : Généalogie des Seigneurs d’Alsace, Supplément aux Œuvres de saint-Augustin, Concordance françoise des Évangiles et surtout l’Histoire de l’Église gallicane.
Vignier était alors très lié à son confrère Philippe Emmanuel de Gondi, marquis des Iles d’Or (Iles d’Hyères), le père du cardinal de Retz, ancien général des galères entré à l’Oratoire après la mort de sa femme, dont il partageait la résidence forcée au château de Villepreux, près de Versailles. Emmanuel de Gondi fut le protecteur de saint Vincent de Paul, membre de la Société Angélique et de la Compagnie du Saint-Sacrement, extériorisation de la «Sainte-Église» ou «Église d'Avignon» (cf : Jean Robin - ibidp.79) La biographie de Vignier est assez obscure : ancien bailli de Beaugency, protestant converti entré à l’Oratoire après un bref passage chez les Chartreux, on le trouve dans le premier Port-Royal parmi les ennemis de Saint-Cyran, au point que la Mère Angélique le renvoya du monastère en 1636. Il semble avoir eu alors peu de sympathies pour l’augustinisme strict. Par quelle évolution le retrouve-t-on, quinze ans plus tard, associé à des amis de Port-Royal et de la doctrine de saint Augustin ? Outre Gondi, il était encore lié avec Félix Vialart de Herse, évêque de Chalons de 1632 à 1680, qualifié de « gallican entêté » par ses adversaires. Son oncle, Charles Vialard, évêque d’Avranches, fut l'historien du cardinal Richelieu. On lui doit une biographie très documentée de ce dernier, Histoire du ministère d'Armand Jean du Plessis, cardinal duc de Richelieu, sous le règne de Louys le Juste, XIII e du nom, Roy de France et de Navarre publié en 1650.

(34) Dom Luc d’Achery fut nommé bibliothécaire de l’abbaye de Saint-Germain des Près par Dom Grégoire Tarisse, Supérieur Général de la Congrégation de Saint-Maur. Dom Tarisse fut un proche du duc de Joyeuse, seigneurs de Couiza que l’on retrouve curieusement dans l’affaire de Rennes-le-Château. Les Joyeuse furent une prestigieuse famille de Haute-Normandie et du Languedoc.
La bibliothèque de Saint-Germain pouvait s’enorgueillir de fonds provenant de l’abbaye de Corbie (400 manuscrits) et de celle de Dartis (20 000 livres). François Rousseau dans son ouvrage consacré à Dom Tarisse « promoteur de l’érudition française bénédictine», paru en 1924 aux éditions Lethielleux rapporte que Tarisse entretenait des liens avec Saint Vincent de Paul et Richelieu qui le portait en haute estime.

(35) Le roi d'Aragon, qui ne tenait pas à se brouiller ainsi avec Sigismond, insista si bien auprès de l'antipape que celui-ci se décida à gagner Collioure où stationnaient ses galères. Ferdinand 1er adressa une suprême mais respectueuse sommation à Pierre de Luna, le 21 novembre. Celui-ci, loin d'obtempérer, se contenta de proférer cette phrase en mettant le pied sur son embarcation prête à lever l'ancre : «Dites à votre roi de ma part : Me qui te feci misisti in desertum ! Moi qui t'ai fait ce que tu es, tu me jettes au désert ».

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